Au débouché du pont Alexandre III, aux Invalides, un immense palais de stuc, le pavillon des manufactures françaises offrait au regard une débauche de sculptures, de frises et de céramiques le long d’une allée qui allait du bord de Seine jusqu’à l’actuel musée des Invalides. A mi-chemin, sur la gauche, au niveau de l’actuelle rue du Maréchal-Gallien, la Porte de Sèvres était adossé au bâtiment. Conçue par Risler d’après un haut-relief de Jules Coutan, elle se trouve maintenant dans le square Félix Desruelles ,situé le long du boulevard Saint-Germain, derrière l’église Saint-Germain-des-Prés. En médaillon central une sculpture de femme dans le style Art Nouveau représente l’art de potier.
Il faut souligner la place
importante accordée à la céramique dans la
décoration fixe et en particulier à l'exposition des productions
de la manufacture de Sèvres qui triomphe à l'exposition
universelle de 1900 avec des formes nouvelles.
A la toute fin du XIXe siècle apparaît une nouvelle tendance
artistique. Les précurseurs comme le Belge Henry van de Velde
(1863-1937) ou son compatriote Victor Horta (1861-1947), tous deux
architectes, s’inspirent de l’esthétique de la nature tout en
utilisant les matériaux les plus modernes comme l’acier et le
béton. En 1893, est érigé à Bruxelles, par Victor Horta,
l'Hôtel Tassel, considéré comme le tout premier édifice Art
nouveau, où la fluidité des espaces fait écho aux
courbes végétales qui investissent ferronneries, mosaïques,
fresques et vitraux. En 1894, l'expression « Art Nouveau »
apparait pour la première fois dans la revue belge « L'Art moderne
», dans un article d’Edmond Picard, pour qualifier la production
artistique de Henry van de Velde.
L’expression passe en France,
l’année d’après, en devenant l'enseigne de la galerie d'art de
Siegfried Bing, 22, rue de Provence, à Paris. Une
véritable école parisienne voit le jour à cette adresse.
Y exposent de grands noms des mouvances symbolistes et Art nouveau
: outre van de Velde, citons Munch, Rodin, Tiffany ou encore
Toulouse-Lautrec. Empruntant une voie plus solitaire, Hector
Guimard, qui déclarait en 1899 : « C’est à la nature toujours
qu’il faut demander conseil », fait figure de génie en créant son
propre univers, le « style Guimard ».
L’art nouveau triomphe à l’exposition universelle de 1900, ses plus belles œuvres côtoyant leur pastiche le plus caricatural, comme les façades en stuc de l’allée centrale des Invalides qui longeait le palais des manufactures nationales. Cet art nouveau n’envahit pas seulement de l’architecture, les manufactures s’en emparent rapidement : les pièces d’orfèvrerie Bouilhet-Christofle, maison fondée en 1830, et les vases de Sèvres, présentés dans le palais susnommé, sont restés célèbres par leur audace, tout en bénéficiant du savoir-faire des créateurs maison. Le galbe de la nature impose également ses canons au mobilier, ainsi Emile Gallé dessine-t-il aussi bien des vases que du mobilier, Hector Guimard réalise des maisons comme des chaises, à l’instar de van de Velde. Louis Majorelle, initié à l’Art nouveau par Emile Gallé dès 1894, présente ses meubles lors de l’exposition parisienne, ce qui lui apporte une renommée internationale, car cette manifestation s’apparente plus à une foire commerciale qu’à une vitrine de musée et les exposants y jouent souvent leur carrière entière en quelques mois. Ainsi Gallé participa aux expositions de 1878, reçu un grand prix à celle de 1889, et deux grands prix et une médaille d’or en 1900, établissant ainsi pour la postérité la pérennité de son art et de son nom.